Auteur
Mamadou SARR
Expert en gouvernance, évaluation et management universitaire
Mamadou SARR est enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar. Après des études en Pharmacie et spécialisations dans le domaine de la biologie, à la Faculté de Pharmacie de l’Université Louis Pasteur de Strasbourg, il a poursuivi ses activités de recherche à l’INSERM U694 ‘Mitochondries : régulations et pathologies’ de l’université d’Angers dans le cadre d’un séjour scientifique postdoctoral. De retour au Sénégal en 2004 et fort de ces expériences, il intègre l’UMI 3189 ‘Environnement-Santé-Société’. Parallèlement à ses activités de recherche, il a exercé pendant 08 ans les fonctions de Secrétaire scientifique de l’Ecole Doctorale des Sciences de la Vie, de la Santé et de l’Environnement (ED-SEV). Il a été également Observateur du Malaria Consortium of Disease Control (MCDC) de la London School of Hygiene and tropical medecine (LSHTM), Chargé de la supervision des programmes doctoraux et du Cadre de développement de carrière pour les jeunes chercheurs africains. Il a exercé les fonctions de Secrétaire général de la Société africaine de Physiologie et de Physiopathologie (Sa2P) dont il est Rédacteur en chef de sa revue d’expression scientifique, Acta Physiologica Physiopathologica Africa (APPA). Il a obtenu l’agrégation de Physiologie humaine et exerce actuellement les fonctions de Professeur titulaire à la Faculté de Médecine, Pharmacie et Odontologie (FMPO) de l’UCAD. Actuellement, le Professeur M. SARR s’est engagé dans la gouvernance universitaire, il a été Directeur de l’Assurance Qualité interne (AQI) de l’UCAD (de 2014 à 2020) et Expert-Consultant du CAMES et d’autres organismes internationaux en Assurance Qualité
Problématique
La forte croissance démographique, le fort taux de scolarisation et la faible efficacité interne et externe des institutions d’enseignement supérieur, peuvent expliquer en partie la massification des apprenants dans les Universités. L’étroitesse du tissu économique, le faible taux d’industrialisation et le défaut de prise en compte de l’employabilité dans les cursus de formation, notamment dans les filières académiques, dans notre espace régional, peuvent également expliquer les taux de chômage enregistrés au cours de ces dernières années.
Ces difficultés peuvent être considérés comme une occasion de changement positif, de regard critique sur nos programmes de formation, en termes de dynamisme sur le plan académique, de développement socio-économique à condition que les curricula de formation soient orientés vers des secteurs économiques porteurs prenant en compte la professionnalisation dans les entités de formation à fort effectif. Les formations professionnelles, jusque-là considérées comme des cursus destinés à préparer les apprenants à l’exercice d’une activité professionnelle voire un métier sont déjà bien développées dans les écoles et instituts de formation des Universités et Centres de formation. Pour les facultés, un effort soutenu doit être mené dans le sens de l’employabilité des diplômés, qui, pour la plupart sont engagés dans des cursus généraux de formation.
L’Université est un espace de libertés académiques dont les membres ont d’abord pour mission d’assurer la production et la diffusion de la connaissance au plus haut niveau, à l’abri des pouvoirs et des intérêts. Mais l’Université est également insérée dans une société, dans une économie. Elle a donc des responsabilités à assumer, tout particulièrement vis-à-vis des étudiants qui en attendent une formation de nature à faciliter leur accès à l’emploi, et, donc, qui soit en phase avec les débouchés prévisibles. D’ailleurs, la Loi LRU d’août 2007 (Libertés et responsabilités des universités) redéfinit les missions du service public de l’enseignement supérieur en y faisant figurer explicitement, désormais, l’orientation et l’insertion professionnelle des étudiants, et, donc, en faisant de l’employabilité des diplômés un impératif. Plusieurs remarques liminaires s’imposent, cependant, face à un tel agenda. D’abord, les diplômes universitaires constituent déjà le meilleur passeport pour une insertion professionnelle, malgré la déqualification qui touche beaucoup de diplômés dans un certain nombre de disciplines ou de filières. Il ne s’agit donc pas d’introduire la professionnalisation des cursus, mais de l’améliorer et de l’adapter. Mais surtout, comment mettre en œuvre une telle professionnalisation des cursus universitaires ? Suffit-il de décréter que les cursus doivent être adossés à la carte des emplois futurs, de généraliser les stages, d’étendre la place des enseignants associés, d’améliorer l’information des bacheliers …
André cartapanis - pROFESSEUR d'Université
Stratégies et Recommandations
La question du basculement du modèle de formation se pose dans les facultés qui traditionnellement ont une vocation académique. En effet, où est-ce dans la nature des facultés de construire de la professionnalité ? Il ne s’agit nullement de transformer les facultés en écoles de formation. Mais, force est de reconnaître que la logique, jusqu’ici, de transmission de connaissances centrée sur des postures intellectualistes, de doter nos apprenants d’un patrimoine à visée universelle, a atteint ses limites du fait que la responsabilité d’accès à l’emploi a toujours été déléguée aux étudiants.
Le développement d’un modèle de formation dite ‘professionnalisante’, issu du modèle de formation professionnelle centré sur les apprentissages, l’encadrement et le suivi rapproché pour les acquis d’apprentissage, et l’intégration en cours de formation dans une communauté de pratiques professionnelles, nous semble plus approprié pour les filières académiques au niveau des facultés. En effet, le modèle de formation professionnalisante a l’avantage de :
- combiner l’enseignement et l’apprentissage ;
- renforcer l’expérimentation pratique ;
- développer des projets individuels voire collectifs par les apprenants ;
- ajuster les curricula de formation aux besoins et attentes de secteurs d’activité professionnelle ;
- développer des compétences déclinables dans plusieurs secteurs d’activité professionnelle ;
- faciliter l’entrée sur le marché de l’emploi.
Une révolution copernicienne ou une inflexion dans les pratiques pédagogiques ?
Dans la mise en oeuvre des politiques ducatives, les universit s ne sont donc plus que des acteurs parmi d’autres. La revendication d’une professionnalisation des fili res qu’elles organisent s’inscrirait-elle alors dans une strat gie de maintien ou de pr servation de la position occup e dans le champ des actions ducatives ? Il se pourrait bien que la diffusion et l’extension d’une nouvelle norme, celle d’une vis e professionnalisante de l’offre de formation (Wittorski, 2012), convien-nent mieux aux uns qu’aux autres, et que certains y voient une opportunit pour (re)prendre pied dans un march de plus en plus concurrentiel, alors que d’autres d noncent la soumission de l’Universit aux diktats du march et l’instrumentalisation des savoirs ou haussent les paules devant une mode pédagogique qui finira bien par passer. Une chose est s re en tout cas : le foss se creuse entre ceux qui estiment qu’il est dans la nature de l’universit de construire de la professionnalit (Aghulon et al., 2012 : 17) et ceux qui refusent toute forme d’all geance de la formation aux exi-gences du march .
Jean François guillaume-Professeur à la Faculté des Sciences Sociales de l’Université de Liège
Méthodologies et étapes requises pour la professionnalisation des formations universitaires
La finalité recherchée pour la mise en œuvre d’un tel dispositif pédagogique de professionnalisation est l’orientation des contenus de formation vers l'acquisition de connaissances, de techniques, d’habiletés, d’aptitudes et de comportements en vue de développer des compétences permettant :
- la pré-qualification des apprenants (licence professionnalisante) pour l’accès à des cursus diplômants spécialisés ;
- l'exercice de métier dans les conditions de maîtrise et d'efficacité durables (licence professionnelle).
Il s’agira de :
- répondre aux besoins du marché du travail ;
- mettre à la disposition des personnes intéressées, dans le cadre d’un cursus académique et au cours d’une formation générale de base, les ressources nécessaires pour acquérir et développer les compétences attendues et s’insérer dans le marché du travail (OIF, 2009, adapté).
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